C’est l’été on oublie tout, ou presque. La semaine dernière on vous demandait sur Instagram combien d’entre vous avait la chance de partir en vacances cet été. Vous avez été 73% à nous répondre par l’affirmative. Chanceux·se·s que nous sommes. Aujourd’hui, je vais vous parler des vacances. Le mot vacances n’est pas nécessairement synonyme de déplacement géographique lointain. Il peut être celui d’une trêve, d’un changement de rythme, d’une relâche. Ici, je vais évoquer avec vous les bienfaits de la pause pour notre santé mentale voire pour notre société. Vous allez me dire, Christelle tu vois de la politique partout il ne faut pas abuser. Et pourquoi pas ? Ce n’est pas moi qui le dis c’est le philosophe et sociologue Hartmut Rosa.
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POURQUOI FERAIT-ON UNE PAUSE ?
Combien de fois avez-vous employé l’expression “Et si on faisait une pause ? » On peut l’utiliser après un tunnel de réunions ou une session intense de révisions pour les partiels. Si on l’emploie si fréquemment c’est car elle est tout bonnement liée à notre rythme physiologique. Notre capacité de concentration avoisinerait les 90 minutes.
Et sur ces 90 minutes, notre attention est à son maximum les 25 premières minutes. Elle baisse peu à peu, puis la lassitude commence à nous envahir au bout de 75 minutes. Tout ceci est physiologiquement normal. Si on ne marque pas de temps de pause on se fatigue, on s’essouffle, on devient irritable et en proie à nos énergies négatives. Ce constat ne date pas d’hier.
PARCE QUE C’EST BON POUR LA SANTÉ
Plusieurs études ont montré que celleux qui ne prennent pas de pause ont plus de risques d’épuisement mental et physique (burn-out) que celleux qui prennent de petites pauses pendant leur journée de travail.
Faire une pause permet de reposer à la fois le corps et l’esprit et de renforcer le système immunitaire. Une étude américaine a même montré que les vacances permettraient au cœur de se reposer et diminueraient ainsi le risque d’accident cardiaque de 30%.
Calmer le jeu du quotidien c’est aussi bon pour notre récupération mentale. C’est un peu poussé le bouchon que de dire « qu’en vacances j’oublie tout » car ça dépend du poids des choses qu’on a à oublier aussi. Pas de mantra toxique, ici on est réaliste. En revanche j’aime bien la métaphore de la docteure Martielle Dumourtier : “les vacances permettent de fermer des dossiers dans nos têtes, nos pensées progressivement se remettent en bon ordre de marche” . Prendre une pause calme le stress et les anxiétés. Une étude de la Marshfield Clinic dans le Wisconsin a d’ailleurs mis en évidence que les femmes qui partaient de façon régulière en vacances avaient moins de risques de faire une dépression. OK on repassera par contre sur le poids de la charge mentale des femmes en vacances.
Mais de manière générale les vacances nous font changer de perspectives et nous aident à prendre du recul sur “certains doss” qui pèsent lourd sur la charge mentale. Combien de temps docteur·e pour que les vacances soient bénéfiques pour ma santé ? En général, il faut 10 jours pour décrocher du quotidien. Mais le must c’est de prendre des vacances régulièrement donc moins long mais plus souvent.
ET POUR MIEUX SE RETROUVER
Certains parlent de manager notre énergie plutôt que notre temps de travail. Mais attention au risque aussi de vouloir tout manager dans un but unique de productivité ou d’utilitarisme. Faire une pause ce n’est pas que la suspension d’un processus. C’est aussi une respiration au sein d’un flot de paroles, un soupir au fil d’une partition de musique, une mi-temps entre deux équipes qui dribblent.
La pause estivale c’est la soupape idéale pour s’échapper d’un monde qui est devenu de plus en plus bruyant. Notif, FOMO, infos anxiogènes en continu, like, DM, mails, Snap, Tweet, réunions… Ça ne s’arrête jamais.
Le philosophe Proudhon avait comme adage: « Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier. » Non pas parce que le dimanche est le jour du seigneur, il n’était pas très croyant Proudhon. Mais plutôt car selon lui, la justification profonde du dimanche est sociale ! Il considérait le dimanche comme une occasion unique de ne pas travailler, d’avoir des conversations et des échanges authentiques sans visée utilitariste. Juste profiter de l’autre juste pour rien. Et je crois qu’en fait tout l’enjeu est là : faire des pauses pour savourer ce “RIEN”.
Et si on apprivoisait ce rien dans les semaines à venir ? Parce que vivre à fond tout le temps ça n’est pas possible. Cette intensité pourrait même nous décevoir et nous fatiguer au bout d’un moment. Il nous faut des moments de rien et des lenteurs pour déguster l’intensité de la vie. Ce qui n’est pas toujours facile à faire par les temps qui courent.
Le philosophe et sociologue allemand Hartmut Rosa appelle notre ère actuelle celle de l’accélération. Pour lui, le problème ce n’est pas tant d’aller vite, mais de se retrouver dans une course effrénée sans ligne d’arrivée car nous sommes devenus insatiables. On alternerait trop rapidement des montées de speed, qu’on n’a pas le temps de savourer, avec des descentes dépressives.
Le temps de l’accélération crée la famine de nos vies.
Vous me voyez venir à présent sur la visée politique de la pause… Au-delà de son constat négatif, Hartmut Rosa a une proposition à nous faire. Pour lui, la vie devient plus cool quand on parvient à entrer en résonance avec le monde. C’est-à-dire ? Je vous explique. Dans l’ère de l’accélération, on n’a que des relations froides, utilitaires, ultra-rapides avec les choses et les êtres. Pour Hartmut Rosa, la solution n’est pas un ralentissement abrupt et improbable mais de trouver le moyen d’obtenir une réponse du monde. Quelques pistes pour y parvenir : en se plongeant vraiment dans un paysage, en développant sa sensibilité avec la matière, en (re) nouant avec les mots, en nous laissant porter par la musique, en prenant le temps des longues discussions entre potes… Non, pose ce téléphone, tu la regarderas plus tard ta notif Insta 😉
Il y a quelques semaines je parlais avec des amis de la force de la contemplation. On était face à la mer et je me suis retrouvée bercée voire hypnotisée par les vagues. Mon esprit s’est mis à vagabonder à droite, à gauche, sans plan précis. Comme si je bloquais mais en réalité ce n’est pas le cas. À la sortie de cette césure temporelle je me suis retrouvée revigorée. Se laisser submerger par le hasard et ouvrir grand les écoutilles pour mieux ressentir ce qui se passe en nous et autour de nous. C’est, je crois, ce que Harmut Rosa appelle la résonance.
#2 Il faut 10 jours de pause pour noter les bénéfices sur la santé mentale.
#3 Faire une pause pour rien, c’est vachement bien.
Quoi de mieux entrer en résonance que la randonnée. Ok mais pour aller où ? Vous n’avez pas d’inspiration ? Alors abonnez-vous à Baroude.s, la newsletter qui vous fait partir à l’aventure avec des super tricks pratiques et des reco de bouquins au top.
Personne ne vous demande de devenir Proust, l’idée c’est juste de prendre la plume pour entrer en résonance avec vous-même. Essayez un atelier d’écriture avec la Maison de l’Ecriture. Il existe aussi de nombreuses associations qui vous en proposent près de chez vous.
Cet été dans vos oreilles, je vous propose, en toute humilité, d’écouter les podcasts mūsae.
Si vous avez envie d’en savoir plus sur le sport, les addictions, la sexualité, les injonctions, l’entrepreneuriat, l’éducation, l’afrodescendance, les émotions… Bref tout ce qui joue sur votre santé mentale, mettez mūsae stories dans vos oreilles.